J’aime à lire comme une poule boit, en relevant fréquemment la tête, pour faire couler.
Jules Renard – Journal (4 février 1894)

J’aime à lire comme une poule boit, en relevant fréquemment la tête, pour faire couler.
Jules Renard – Journal (4 février 1894)

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Sommeil d'éclat

Sommeil d’éclat et Haïku kara Satho sont deux recueils consacrés aux corps, à la relation des corps, à la jouissance, à la puissance des corps, à l’impact de la relation des corps dans une vie de couple. À la séparation des corps aussi, aux chocs de cette séparation dans la relation entre deux êtres, à la solitude qui s’empare de celui qui reste, de celui qui part, cette mélancolie qui prend place, qui prend la place de l’enthousiasme de la rencontre.

Lorsque nous nous sommes rencontrés, au début des années ’80, je vivais de petits boulots en attendant la gloire et la renommée (j’attends toujours…). J’étais, parfois, « écrivain public » et rédigeais des demandes administratives au sein d’une association d’aide aux migrants. Akima, elle, travaillait comme femme de ménage, garde d’enfant, cuisinière, bonne à tout faire pour une avocate parisienne qui profitait malhonnêtement (le mot n’est-il pas trop faible ?) de la situation précaire de celle qui allait devenir et qui reste mon amie à jamais. Dans son pays, Akima était secrétaire de direction, maitrisait quatre langues : le philippin bien sûr, l’anglais, le japonais et l’espagnol. Mais malheureusement pas le français. Et lorsqu’on ne connait pas la langue d’un pays, il est difficile, très difficile de trouver un emploi salarié à hauteur de ses savoir-faire. D’autant lorsqu’on est arrivé par des chemins de souffrances. La France n’aurait dû être qu’une étape vers le Royaume-Uni, elle y resta une vingtaine d’années. Aujourd’hui, elle vit en Écosse, dans un village où il y a plus de distilleries que d’habitant et travaille aux relations internationales pour une grande marque de whisky.

Au début, elle me demanda de lui apprendre le français, des cours de conversations. En échange, elle m’initiait au philippin. Puis au japonais. Nous en vînmes à parler littérature, poésie. Elle me lisait ses textes, je me laissais bercer par les assonances. Elle m’en expliquait le sens. Et plus nous nous connaissions et plus j’avais envie de « translater » son univers, le donner à voir.

Plusieurs des textes de ces recueils ont été accueillis par des revues aussi différentes que Décharges, Bacchanales, Cortex… Dès qu’elle le put, Akima écrivit en français. D’abord de courtes nouvelles comme Les danseurs Za-Pa (lauréat du prix « nouvelles écriture » en 2004) ou Futile indolence, puis un roman fragmentaire publié en grande partie par la revue Ricercare : Les fins désespoirs.

La présente édition est illustrée des Empreintes & Explosions de Valérie Lamarre.

L'hymne à la fête

Tout le monde vous le dira, je me donne toujours le temps pour écrire, pour cuisiner, pour recevoir, pour lire, chanter, c’est pour moi le luxe suprême. Avoir le temps. Mais là, je pense que j’ai un peu exagéré. Commencé en mai ’80 (la datation du manuscrit l’atteste), j’ai considéré comme « fini » l’hymne à la fête le 18 février 2014, soit presque 34 ans plus tard. Il m’a fallu encore 6 ans pour publier ici cet inédit. Pour un peu, il faisait partie de mon œuvre posthume. 

L’hymne à la fête est la première de mes « grandes odes » (la seconde en fait, mais la première, je l’ai brûlée). Je la voulais chatoyante, explosive, traitant de tout, de la famille, de l’amour, du monde, dans la lignée de Prévert et des surréalistes.

De la première version, il ne reste rien ou presque, quelques vers, un quatrain, même la structure rythmique a évolué mais l’ambiance, ce rêve éveillé qui sous-tend le récit, ces rêves devrais-je écrire renferment les mêmes images.

L’hymne à la fête, dans sa version finale, est une ode à la vie, à la jeunesse, à la folie, un poème initiatique, un chant, un voyage, un simple voyage à la rencontre des amants de la nuit. Un grand bal, pour faire référence, une vie traversée, universelle, où

Nous étions seuls

Nous étions deux

Nous nous sommes aimés.

Extrait
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L'hymne à la fête

Tout le monde vous le dira, je me donne toujours le temps pour écrire, pour cuisiner, pour recevoir, pour lire, chanter, c’est pour moi le luxe suprême. Avoir le temps. Mais là, je pense que j’ai un peu exagéré. Commencé en mai ’80 (la datation du manuscrit l’atteste), j’ai considéré comme « fini » l’hymne à la fête le 18 février 2014, soit presque 34 ans plus tard. Il m’a fallu encore 6 ans pour publier ici cet inédit. Pour un peu, il faisait partie de mon œuvre posthume. 

L’hymne à la fête est la première de mes « grandes odes » (la seconde en fait, mais la première, je l’ai brûlée). Je la voulais chatoyante, explosive, traitant de tout, de la famille, de l’amour, du monde, dans la lignée de Prévert et des surréalistes.

De la première version, il ne reste rien ou presque, quelques vers, un quatrain, même la structure rythmique a évolué mais l’ambiance, ce rêve éveillé qui sous-tend le récit, ces rêves devrais-je écrire renferment les mêmes images.

L’hymne à la fête, dans sa version finale, est une ode à la vie, à la jeunesse, à la folie, un poème initiatique, un chant, un voyage, un simple voyage à la rencontre des amants de la nuit. Un grand bal, pour faire référence, une vie traversée, universelle, où

Nous étions seuls

Nous étions deux

Nous nous sommes aimés.

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Mes amours noires

Mes amours noires a été édité pour la première fois en 1986. J’allais sur mes 25 ans et jamais je n’aurais imaginé écrire cette préface. Souvenez-vous ! « Quand viendra l’an 2000… » alors, pensez ! L’an 2020 n’était pas au programme.

Et pourtant, nous y sommes, j’y suis, proche de la soixantaine, aussi vieux que les vieux que nous querellions alors. Le seul qui trouvait grâce à mes yeux, à l’époque, se nommait Léo Ferré. Il avait 70 ans à peine et je le voyais comme un esprit tutélaire, un grand-père puisqu’il avait l’âge d’être le mien.

Mes amours noires lui doivent beaucoup. Pour la forme et pour le fond. D’abord parce que ce sont des poèmes « à dire », ayant fait mienne cette colère exutoire qui transforme la lettre en cri, le verbe en chant, le vers en musique. Ensuite parce que l’art poétique défini par la Préface, introduction du livre « Poètes vos papiers ! » et de l’album « il n’y a plus rien », me collait et me colle toujours à la peau. (Extrait de la préface)

Depuis sa première édition, les poèmes de ce recueil ont souvent été repris en revue, à commencer par le magazine LU qui le classa parmi les « lectures de l’été 1986 » au côté de, excusez du peu, Jean Breton, Roland Nadaus ou encore Yves La Prairie.

La présente édition est illustrée par les voyages de Cyrano de Valérie Lamarre.

Les yeux de l'autre

Les yeux de l’autre est une fulgurance où l’auteur s’interroge sur ce qu’il montre de lui, sur ce qu’il est, ou croit être et sur ce que l’autre perçoit. Un jeu de miroir et une mise en abyme.

Il est difficile de parler de ce poème-fleuve écrit au mitan des années ’90. Parcours initiatique ? Réflexion sur l’état du monde et son égocentrisme à en oublier le regard de l’autre ? Nos peurs, nos humeurs, nos douleurs et l’aseptisation, l’uniformisation, la déshumanisation sont autant d’éléments à combattre nos envies, nos joies ou nos amours. Nous vivons un monde triste où tout concoure à emplir nos vies de désespoirs.

George Orwell écrivait, il y a plus de 70 ans, imaginant la société à venir et voulant la combattre, cette phrase si simple et si juste : Avant l’homme, il n’y avait rien. Après l’homme, s’il devait s’éteindre, il n’y aurait rien. Hors l’homme, il n’y a rien.

Il parlait d’humanité comme Les yeux de l’autre parle d’amour, celui que l’on doit porter à l’autre puisque nos sociétés n’existent que par leurs altérités.

Les yeux de l’autre a été publié pour la première fois en version numérique par les éditions Tol’ed.

Extrait
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Les yeux de l'autre

Les yeux de l’autre est une fulgurance où l’auteur s’interroge sur ce qu’il montre de lui, sur ce qu’il est, ou croit être et sur ce que l’autre perçoit. Un jeu de miroir et une mise en abyme.

Il est difficile de parler de ce poème-fleuve écrit au mitan des années ’90. Parcours initiatique ? Réflexion sur l’état du monde et son égocentrisme à en oublier le regard de l’autre ? Nos peurs, nos humeurs, nos douleurs et l’aseptisation, l’uniformisation, la déshumanisation sont autant d’éléments à combattre nos envies, nos joies ou nos amours. Nous vivons un monde triste où tout concoure à emplir nos vies de désespoirs.

George Orwell écrivait, il y a plus de 70 ans, imaginant la société à venir et voulant la combattre, cette phrase si simple et si juste : Avant l’homme, il n’y avait rien. Après l’homme, s’il devait s’éteindre, il n’y aurait rien. Hors l’homme, il n’y a rien.

Il parlait d’humanité comme Les yeux de l’autre parle d’amour, celui que l’on doit porter à l’autre puisque nos sociétés n’existent que par leurs altérités.

Les yeux de l’autre a été publié pour la première fois en version numérique par les éditions Tol’ed.

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Les versets salhoniens

Salhon a publié son premier verset en 1973 dans « Prêtria », revue russe clandestine et catholique. « Verset » comme un jeu, désillusion d’une religion d’Etat, d’un opium du peuple, comme un spleen moscovite ; son nom, Salhon, comme une énigme. Pendant plus de 20 ans, personne ne sut qui se cachait sous ce pseudonyme. Salhon était soviétique, c’est tout ce que l’on savait. Ce que l’on croyait. Était-il Russe ? Moldave ? Ukrainien ? Il écrivait en russe mais cela ne voulait pas dire grand-chose.

Quasiment toutes les revues littéraires dissidentes des pays de l’ex-bloc de l’Est, celles qui se fabriquaient à coup de stencils, de ronéos et de sueurs et qui circulaient, on ne sait pas comment, sans doute par les étudiants, de Samara à Kaliningrad, de Kiev à Vladivostok, et qui, parfois, sortaient sur l’occident par la porte Bulgare ou Lettone, ont publié des versets salhoniens entre 1973 et 1990.

Aujourd’hui, nous en savons un peu plus.

Salhon vit tranquillement dans le Maine (U.S.A) et a repris son patronyme : Stan Mistchevkhov. Son œuvre est, sans aucun doute, celle d’un poète représentatif de la « beat generation on the road » russe, celle qui découvrit le jazz avec Herbie Hancock, Miles Davis ou Nina Simone. Les disques passaient les frontières, je me souviens, dans les valises de lycéens, dont j’étais. Il a écrit a priori plusieurs centaines de versets, j’en ai retenu 47 qui m’ont semblé appartenir à un même instant de vie.  (Extrait de la préface)

En France, les versets salhoniens ont notamment été publiés par Ricercare, Alètes, La tournée de la Benne (revue Décharges), La porte, Tol’ed…

Poèmes du 11 juillet

Poèmes du 11 juillet et d’ailleurs a été écrit en très grande partie le 11 juillet 1984. Précisément dans la nuit du 11 au 12 juillet. Enfin, pour être vraiment précis, la structure du recueil et plus de la moitié des textes ont été rédigés cette nuit-là dont Bologne, pivot de l’ensemble. Cette nuit était un peu spéciale. J’étais seul pour la première fois depuis six semaines et, comme souvent lorsque je suis seul, je conversais à part moi, refaisais le monde, couvrant ces grandes feuilles d’écolier, quadrillées et margées, de mon écriture illisible.

Il me fallut quelques temps, une ou deux semaines, pour me relire et mettre au propre ces pollutions scripturaires qui déchiraient littéralement les grands carreaux de mes feuilles.

Puis, ces Poèmes du 11 juillet et d’ailleurs ont été publiés avec Mes amours noires. Un recueil en incise d’un autre recueil. Un supplément. J’aimais cette idée de cacher au sein d’un livre un autre livre. Depuis, certains des textes présentés ici ont été repris dans différentes revues poétiques.

Poèmes du 11 juillet… a toujours eu une place à part dans mon travail. Sans doute parce qu’il n’est pas un vrai « recueil » au sens propre du terme. Je n’ai rien recueilli, ou presque. J’ai construit un ensemble. Comme un musicien travaille son album.

C’est aussi à partir de cette composition que j’ai commencé à réfléchir aux structures spiralées où le texte s’enchaîne à lui-même pour progresser. Ce sera la construction de L’Anamnèse, roman où j’explore, sous le prétexte d’une fausse autofiction, nos capacités à sélectionner nos souvenirs pour réécrire, sans cesse, notre histoire.

Le texte Bologne a fait l’objet d’un tiré à part au début des années ’90. Plusieurs textes de ce recueil ont été publié en revue et/ou sur le Net et, notamment, dans une version numérique par les éditions Tol’ed.

La présente édition est illustrée par les maisons Usher de Valérie Lamarre.

Extrait
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Poèmes du 11 juillet

Poèmes du 11 juillet et d’ailleurs a été écrit en très grande partie le 11 juillet 1984. Précisément dans la nuit du 11 au 12 juillet. Enfin, pour être vraiment précis, la structure du recueil et plus de la moitié des textes ont été rédigés cette nuit-là dont Bologne, pivot de l’ensemble. Cette nuit était un peu spéciale. J’étais seul pour la première fois depuis six semaines et, comme souvent lorsque je suis seul, je conversais à part moi, refaisais le monde, couvrant ces grandes feuilles d’écolier, quadrillées et margées, de mon écriture illisible.

Il me fallut quelques temps, une ou deux semaines, pour me relire et mettre au propre ces pollutions scripturaires qui déchiraient littéralement les grands carreaux de mes feuilles.

Puis, ces Poèmes du 11 juillet et d’ailleurs ont été publiés avec Mes amours noires. Un recueil en incise d’un autre recueil. Un supplément. J’aimais cette idée de cacher au sein d’un livre un autre livre. Depuis, certains des textes présentés ici ont été repris dans différentes revues poétiques.

Poèmes du 11 juillet… a toujours eu une place à part dans mon travail. Sans doute parce qu’il n’est pas un vrai « recueil » au sens propre du terme. Je n’ai rien recueilli, ou presque. J’ai construit un ensemble. Comme un musicien travaille son album.

C’est aussi à partir de cette composition que j’ai commencé à réfléchir aux structures spiralées où le texte s’enchaîne à lui-même pour progresser. Ce sera la construction de L’Anamnèse, roman où j’explore, sous le prétexte d’une fausse autofiction, nos capacités à sélectionner nos souvenirs pour réécrire, sans cesse, notre histoire.

Le texte Bologne a fait l’objet d’un tiré à part au début des années ’90. Plusieurs textes de ce recueil ont été publié en revue et/ou sur le Net et, notamment, dans une version numérique par les éditions Tol’ed.

La présente édition est illustrée par les maisons Usher de Valérie Lamarre.

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La trirème irradiée

J’ai écrit la première version de La trirème irradiée en 1988. À l’époque, nous étions en pleine révolution. Magali venait de naître, nous avions quitté notre bonbonnière de la rue Belgrand, dans le vingtième parisien, pour un appartement trois fois plus grand, assez « bourgeois » selon nos critères (et surtout selon nos moyens financiers) en plein cœur du Val Fourré (Mantes-la-Jolie) et je sentais bien qu’il nous faudrait « changer » quelque chose dans notre manière de vivre.

Je n’en dirai pas plus ici, ce n’est pas le sujet, mais ce sentiment de l’urgence d’agir, et je parle bien d’une modification du calendrier, est né avec Magali, est né de notre parentalité. C’est l’origine de La trirème irradiée. « Trirème » parce que nous serons trois embarqués, chacun à son niveau, « irradiée » au sens littéral du terme, pour rayonner, pour illuminer de nos vies nos vies et, peut-être un peu, celles des autres.

 

C’est pour tout cela que j’ai choisi d’écrire autour de ce « trois temps » qui se construisait à l’époque. Le temps de la valse et de la musette. Plus rarement celui du rock. Mais aussi, symboliquement, les trois temps qui nous traverse : Chronos (la continuité), Kairos (l’instant), Aiôn (le cycle). La structure du recueil de 1988 est presque entièrement construite à partir du chiffre 3. Les poèmes sont composés de 3 x 3 vers et les périodes de 3 x 3 poèmes.

Ce recueil fut publié par les éditions Hors Commerce à une centaine d’exemplaires, déjà illustré par Valérie. Certains textes parurent également en revue. Puis, il rejoignit ses camarades dans mes tiroirs.

En 2010, je tenais un blog poétique, chapitré par recueil, et j’ai commencé à livrer La trirème irradiée. Il m’a semblé utile de préciser à mes lecteurs l’intention qui prédestinait la création de cet ensemble et j’écrivis alors une sorte d’introduction poétique qui commençait comme suit :

LA TRIRÈME IRRADIÉE est mon vaisseau amiral, animal, où galérien j’étais, suis et reste ! Trois fois trois rangs de lettres brouillées forment les images de mots, reflets de voix qu’il faut entendre.

Mes « followers » apprécièrent visiblement et leurs commentaires m’incitèrent à récidiver. Chaque poème fut publié avec une prose introductive. Très vite, j’ai compris qu’il y avait matière à un répons, au sens musical du terme, ou un cantique, une narration en écho des vers, une histoire (Chronos) entrecoupée d’instants (Kairos) formant un cycle (Aiôn).

 

C’était ma première expérience d’écriture poétique en ligne. Jusqu’alors je me contentais de poster mes textes, parfois avec une note explicative et/ou historique. Ici, j’interagissais avec mes abonnés aux flux de l’écriture. Naturellement, cela influença mon écriture et m’obligea, notamment, à être plus « régulier » dans ma production, à livrer chaque semaine un nouveau texte, à construire un ensemble au fil du clavier. Des personnes que je ne connaissais pas m’incitaient à poursuivre, me transmettaient leurs enthousiasmes, interprétaient mes écrits (parfois à contre sens mais cela m’aidait aussi à préciser mon propos). Et plus j’avançais et plus il me semblait trouver une écriture « neuve », une inspiration. Celle que je croyais avoir perdue par usure du temps. La trirème irradiée, avec ce répons entre la prose et les vers, me ressourçait.

L’histoire, c’est une évidence, fut une odyssée. La mienne. La nôtre. Et peut-être un peu la vôtre. Qui sait ?

(Extrait de la préface)

Édition illustrée par Valérie Lamarre (visiter son site).

Des lents élans

Le premier tanka que j’ai lu, ou pour être exact, celui dont je me souviens comme le premier, est celui-ci :

Le voyage de mon seigneur

dure depuis longtemps

le cherchant dans la montagne

irai-je à sa rencontre ?

ou me tiendrai-je dans l’attente ?

Il était au début de l’anthologie de la poésie japonaise classique (traduction de M. G. Renondeau – éditions Gallimard – 1978) et attribué à la Princesse Iwa, femme du 16ème empereur du Japon, Nintoku et descendante de l’empereur Kōgen.

 

Ce poème n’était pas daté mais sa composition, a priori, remontait à la fin du IVème siècle soit, chez nous, le début de la chute de l’empire romain (occidental) et de la décadence. En aparté, je suis toujours étonné des écarts culturels entre les civilisations lorsque l’on compare les époques, même si, souvent, il s’agit de phénomènes cycliques, révolutionnaires pourrais-je écrire. Ceci étant, et peut-être était-ce un effet de la traduction, je ne sais pas, ce poème m’arrêta. Je n’ai pas d’autre verbe sous le clavier. Et mon esprit s’engouffra dans l’immensité des paysages montagneux et du voyage proposé. J’étais cette princesse indécise entre le mouvement et l’immobilité, l’attente et l’anticipation. 

Depuis, lorsque le besoin de méditer me travaille, que je souhaite prendre un peu de recul et quitter un tant soit peu l’agitation du quotidien, je ne sais comment, je me retrouve à écrire ces courts poèmes. Ils me reposent.

Valérie, lorsque nous avons réfléchi à la forme que nous souhaitions donner à ce livre, m’a proposé d’accompagner ces « chants courts » (traduction littérale du mot « tanka ») par des Quarts Carrés intégrants le principe des mandalas puisque tankas et mandalas viennent de la même tradition bouddhique et recherchent l’un et l’autre l’équilibre Zen.

 

(Extrait de la préface)

 

Édition illustrée par Valérie Lamarre (visiter son site).

 

Extrait
Extrait

Des lents elans

Le premier tanka que j’ai lu, ou pour être exact, celui dont je me souviens comme le premier, est celui-ci :

Le voyage de mon seigneur

dure depuis longtemps

le cherchant dans la montagne

irai-je à sa rencontre ?

ou me tiendrai-je dans l’attente ?

Il était au début de l’anthologie de la poésie japonaise classique (traduction de M. G. Renondeau – éditions Gallimard – 1978) et attribué à la Princesse Iwa, femme du 16ème empereur du Japon, Nintoku et descendante de l’empereur Kōgen.

 

Ce poème n’était pas daté mais sa composition, a priori, remontait à la fin du IVème siècle soit, chez nous, le début de la chute de l’empire romain (occidental) et de la décadence. En aparté, je suis toujours étonné des écarts culturels entre les civilisations lorsque l’on compare les époques, même si, souvent, il s’agit de phénomènes cycliques, révolutionnaires pourrais-je écrire. Ceci étant, et peut-être était-ce un effet de la traduction, je ne sais pas, ce poème m’arrêta. Je n’ai pas d’autre verbe sous le clavier. Et mon esprit s’engouffra dans l’immensité des paysages montagneux et du voyage proposé. J’étais cette princesse indécise entre le mouvement et l’immobilité, l’attente et l’anticipation. 

Depuis, lorsque le besoin de méditer me travaille, que je souhaite prendre un peu de recul et quitter un tant soit peu l’agitation du quotidien, je ne sais comment, je me retrouve à écrire ces courts poèmes. Ils me reposent.

Valérie, lorsque nous avons réfléchi à la forme que nous souhaitions donner à ce livre, m’a proposé d’accompagner ces « chants courts » (traduction littérale du mot « tanka ») par des Quarts Carrés intégrants le principe des mandalas puisque tankas et mandalas viennent de la même tradition bouddhique et recherchent l’un et l’autre l’équilibre Zen.

 

(Extrait de la préface)

 

Édition illustrée par Valérie Lamarre (visiter son site).

 

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Calendaire éphémère

Il y a des rencontres dans votre vie que vous pouvez dater précisément et d’autres non. Cela dépend principalement non pas de la (ou des) personne(s) rencontrée(s) mais du contexte, de l’instant ou de l’incident qui accompagne cette rencontre. Je sais, par exemple, exactement quel jour j’ai rencontré Valérie.

Pour Jirina, ce fut pareil.

Le lendemain de la noël ‘89, le 26 décembre précisément, nous revenions de quelques jours en famille et je découvris son nom en prenant le courrier. Elle m’écrivait pour me demander l’autorisation de traduire certains des textes de Mes amours noires pour les auditeurs de Radio Prague à qui elle avait proposé une émission sur la poésie contemporaine.

Pour ceux qui ne se souviennent pas de cette époque, la Tchécoslovaquie était en pleine révolution dite « de velours » et le gouvernement communiste d’alors s’apprêtait à abdiquer au profit de Václav Havel. J’étais, de fait, un peu étonné de ce courrier et encore plus d’apprendre que mon recueil était lu à Prague. J’acceptai, bien sûr, et nous commençâmes à correspondre.

Au printemps ’91, elle m’annonça son intention de venir visiter Paris et me demanda si nous pouvions l’accueillir avec son amie Ivana. Bien évidemment, nous étions ravis de la recevoir.

C’est lors de ce séjour que Jirina me montra pour la première fois son recueil « Calendaire éphémère » et me demanda si je ne pouvais pas l’aider dans la mise en forme de sa traduction en français. J’étais ravi. Nous nous mîmes au travail et le premier jet fut bouclé dans le temps de son séjour. Je lui proposai de promouvoir ses textes auprès de quelques revuistes de mes connaissances et courant ’92, certains de ces poèmes furent publiés en France et en Belgique.

(extrait de la préface)

Jirina FUKOVA est tchèque. Elle a traduit des textes d’auteurs français et russes, tout en travaillant dans une bibliothèque à Prague. Elle a publié en 1991 son premier recueil de vers, dont sont extraits certains des textes présentés ici (d’autres sont inédits). Elle a mis par ailleurs en ondes dans les années ’90, pour son émission à Radio Prague, des traductions de Verlaine, Charles Cros et de poètes francophones contemporains.

Philippe MILBERGUE a trahi en français, avec le concours de l’auteur, ces deux premiers recueils.

Édition illustrée par Valérie Lamarre (visiter son site).